UNE BOMBE … hier soir

C’était mercredi 15 janvier 2020 sur la 5 à partir de 20 H 50 avec l’émission « La Grande Librairie », cette fois EN DIRECT dans un local bien plus vaste que d’habitude, … puisqu’était invitée Vanessa Springora. Débat intense autour de son livre témoignage, « Le consentement ». Après un long temps consacré à bien comprendre (par les réponses claires et directes de Vanessa) plusieurs moments clés de ce qui s’était passé avec le prédateur Gabriel Matzneff, quand elle avait 13, puis 14, puis 15 ans, quand ce pédocriminel pervers narcissique en avait 50, le débat a été ouvert à un sociologue, une pédopsychiatre et un juge des affaires d’enfants et adolescents à la retraite. Bon choix dans les compétences invitées.

Pendant toute l’émission, que je ne peux que vous encourager à revoir en replay, car ce moment restera une BOMBE sociétale, pas moins, … le langage du corps de chacune et chacun a été on ne peut plus explicite. D’abord celui de Vanessa, qui reste droite, digne, sobre, quasi immobile tant elle est « présente » à ce qui se passe, même en étant sensible comme l’a traduit son visage ; signe que cette femme a intégré et dépassé les enseignements d’un long travail sur soi.

Celui du juge, qui perd ses moyens et essaye de détourner le sujet quand François Busnel, l’excellent animateur de cette émission, rappelle que le monstre sortait à l’occasion de sa poche une lettre d’appui de François Mitterrand,  et oui. À un moment, les politiques (de toutes tendances) ont été cités comme acteurs et complices de cet exorbitant privilèges d’une caste dégradée d’intellectuels … « entre soi ». « On en est », ou « on n’en est pas »; … le « mérite » pour tenir des responsabilités n’y a plus rien à voir. Le juge, qui comprends que cette émission est un des symboles vivants du passage entre un « avant » et un « après » dans notre société (voire presque « civilisation ») se ressaisi et devient radical jusqu’à la fin de l’émission, répétant la même chose : engager un acte sexuel avec un enfant ou adolescent mineur est un crime, point barre, et il ne convient plus de dire pédophile (mot complaisant qui tend à excuser par son aspect clinique) mais « pédocriminel ». Ce que j’approuve complètement, … à condition que les condamnations soient lourdes et mises en œuvre.

Celui de la pédopsychiatre, qui a techniquement correctement expliqué la nature violente et les souffrances des victimes, tant aux périodes des actes que longtemps (toujours des années ou dizaines d’années) ensuite dans la vie. En effet, ayant eu l’honneur de collaborer en son temps avec Marie-France Hirigoyen, nous ne connaissons pas de cas où la déformation de structuration de l’être ne coûte pas longtemps, … et le prétendu éventuel plaisir momentané des jeunes victimes n’est qu’un prétexte facile et écœurant de la part des praticiens de cette caste qui se considère « au-dessus » des autres. La pédopsychiatre traite un sujet si difficile qu’elle a eu quelques difficultés à expliciter la conceptualisation de cela, évitant de plus de pointer, pas assez nette et ferme, … le corps l’a montré ; elle a fait ce qu’elle a pu, difficile. Je suis quasiment sur qu’elle était gênée par le fait que Françoise Dolto est une des signataires de la fameuse lettre ouverte (voir Marianne N° 1191) dont on apprend là par Vanessa que ce Matzneff en était le rédacteur. Mais je sais par ailleurs que Dolto s’est laissée piéger, ce qui n’a pas été le cas des autres signataires … tels de Beauvoir et Sartre entre autres prétentieux.

Celui du sociologue, assurant dignement son métier voyant là validé après des années une thèse publiée en 2013 (si j’ai bien entendu) et toujours mal reconnue jusqu’à maintenant, tendu dans l’intensité d’expliquer correctement.

Langage du corps enfin de l’animateur, visiblement dans la tension du « direct », qui comme toujours avait très bien préparé, … mais n’a quand même pas pu résister d’essayer de faire dire à quel point les livres et les mots sont importants ; Vanessa l’a en peu de mots repositionné sur les rails : l’objet de l’émission. Mais il avait raison : les livres auront plus de chance de rester que les clouds internet (c’est un risque que je prends dans mes publications), et il importe pour les prises de conscience collectives de « mettre des mots sur les maux » !

Une BOMBE, car plusieurs tabous ont sauté d’un coup, et nous ne faisons qu’entendre le bruit de l’explosion avant d’en voir toutes les retombées. Sans prétendre être exhaustif :

  • L’orgueil dégénéré, d’une prétendue aristocratie qui se vautre dans les complaisances de proximité des oligarchies au pouvoir, est mis en lumière de façon flagrante.
  • Les réalités de ce que se permettent, derrière les murs de belles demeures, une partie des membres de cette caste, … ET la complaisance, la tolérance outrancière et l’impunité que ce système non seulement accorde mais garantie à ces individus.
  • La manipulation intellectuelle dont la société française a été victime. Mais l’histoire témoigne d’autres processus comparables partout ailleurs, simplement avec des variantes culturelles. Apparemment dans les années 70-80 mais en fait depuis bien plus longtemps sous d’autres formes et avec d’autres familles d’acteurs. Signe de la mutation dont nous savons qu’elle est en cours = BOMBE  car là saisie au grand jour.
  • La morale trop souvent marquée d’orientations culturo-religieuses, …alors qu’il convient de parler, promouvoir, et exiger l’éthique, … telle que nous la développent tant un Spinoza qu’un Edgar Morin, et quelques autres.
  • La mise en évidence des manipulations des personnes, femmes tout comme hommes, que nous savons qualifier dorénavant de « pervers narcissiques ». Elles-ils commencent toujours par une manœuvre de séduction sexualisée, … puis se mettent en place les mises en dépendance. En psychiatrie, cette pathologie est identifiée de longue date, mais là, il n’est plus possible à la société de dénier et passer à côté. Les tabous sautent. Remarque qui importe : cette pathologie n’enlève rien à la responsabilité pénale, lourde ; aussi, oui parlons quand il s’agit d’enfants de pédocriminels et non plus de pédophiles. Point barre et action en supprimant toute durée de prescription, et en ouvrant les procès de tous les coupables identifiés, TOUS.

Il y aurait encore tant à dire, … au replay, et divers ouvrages et articles qui en traitent.

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