Le 21 septembre 2021 en soirée, dossier étonnant sur ARTE – documentaire/histoire : « Pétrole, une histoire de pouvoir », de 2020, par Andreas Sawall, en deux volets suivis de « Coup de poker sur l’essence », de 2018, par Jean Crépu. À vos replays , ne le regretterez pas.
L’histoire au travers de ces trois documents porte du premier puit de pétrole en Pennsylvanie au milieu du XIXème à nos jours, l’ensemble constituant trois heures d’un formidable effort d’objectivation, avantages et inconvénients, pourquois et comments. Bien entendu les machines consommant pétrole ou essence ont considérablement évoluées dans l’amélioration de leur rendement et la réduction de leurs coûts, MAIS en partant du constat initial que 50 litres de pétrole dégagent autant d’énergie que le travail de 1000 hommes en une journée, … d’où immédiatement la ruée sur le pétrole, l’or noir, à une époque où démarre l’accélération de l’industrialisation et où va être inventée l’automobile, … d’où l’explosion (moteurs à explosion) du couple infernal « pétrole-automobile » !Puisque, en 2021 et depuis quelques années, le genre humain devient progressivement conscient de l’impact qu’ il a eu et a, par sa « gestion du progrès » sur les cycles mêmes d’évolution de notre planète, le temps de l’anthropocène, … ces trois documentaires sur ARTE font clairement ressortir les impacts lourds de l’extraction, du transport, de la transformation, de l’exploitation du pétrole (des pétroles) dans cette écrasante responsabilité.
Des pétroles, car l’histoire « du » pétrole met en évidence qu’assez régulièrement, tous les trente ans en moyenne, géologues, exploitants et économistes déclarent que le pic de ressources est atteint avant disparition annoncée, mais de « nouvelles » techniques de recherche et d’extraction effacent ces prospectives de déclin, aussi la projection à terme des quantités disponibles semble sans fin, à hauteur de la demande (pudiquement appelée « besoins »), toujours exponentielle. Il est des pétroles d’origines et de qualité diverses, … la dernière variante étant l’extraction des gaz de schistes, drastiquement destructrice pour l’environnement tant en profondeur qu’en surface, mais que les USA ont relancé, quoiqu’il en coûte pour les habitants et environnements, …en vue de redevenir indépendants de quiconque, et se donner la chance de tenter de demeurer la première puissance mondiale. Tant pis donc pour les populations lambdas et autres « riens », ni pour l’accroissement mortelle des pollutions directes et indirectes.
Il est aisé de démontrer que les produits et usages des dérivés des pétroles saturent notre mode de vie, public et privé, où que ce soit, … mais fait sobrement, nettement, non polémique. Très difficile évidemment d’imaginer notre société sans produits dérivés des pétroles, … sauf à considérer un mode de vie encore plus sobre que celui des amischs ! Ce serait un choc civilisationnel profond, … lourdement impactant , … et pourtant !
Par les déchets à toutes les phases du processus, les pollutions sont destructrices et irrémédiables pour longtemps ; seuls les déchets du nucléaire présentent mais à plus long terme de pires inconvénients.
Aux débuts de l’histoire des pétroles, des fortunes considérables ont été rapidement accumulées. Plusieurs personnes et clans prenant habilement l’avantage. La Compagnie Standard Oil a rapidement pris de dessus, montée et dirigée par John Davison Rockefeller, premier milliardaire. À son zénith, sa fortune correspondait quand même à l’équivalent de quatre fois celle de Bill Gates aujourd’hui ! Les intérêts pour la nouvelle caste du pétrole sont tels que très vite les grands propriétaires du secteur ont été et demeurent oh combien membres de la classe dominante que nous sommes quelques-un(e)s à appeler le Deep power, avec les grands décideurs financiers, ceux du militaro-industriel, les patrons des clubs de grandes multinationales dont les Big Pharma … Là sont les vrais « marionnettistes » qui décident des parcours de leurs marionnettes, nos chefs d’État (au moins en « Occident ») ; des Institutions telles Bilderberg n’en étant que les relais d’animation.
Au moins du temps des débuts des Rockefeller & al, cette richesse, et les pouvoirs quasi absolus liés, correspondait-elle encore en dominante à de l’économie réelle. À nos débuts de XXIème, la financiarisation a mise de côté l’économie réelle et ne correspond que peu à quelque chose de concret. Moyennent quoi le pouvoir réel n’est plus que le fait des grands financiers. Les médias « à la botte » assurent l’habillage du système pour nos populations, dont les éducations générales ont été délestées des apports utiles au sens critique.
La clé du succès des usages des pétroles ? Les trois documentaires la donnent en clair à plusieurs reprises. Simplement, la vie quotidienne est devenue plus confortable, à des prix de plus en plus « démocratisés », dans le cadre d’une consommation de plaisirs faciles copiant plus ou moins la « valorisée » american way of life. Disparition, depuis l’illusion de paix de l’après-guerre, de la nécessité de l’effort pour survivre puis vivre puis gaspiller sans penser à compter.
Dans de telles conditions, qui mènent à des modes de vie sans efforts et sans travail, allant même récemment jusqu’à l’idée d’un « revenu » gratuit pour tous qui entretienne les consommations de masse, … la valeur de l’effort, l’exigence de qualité … sont devenues risibles. L’expérience sur plusieurs décennies, assez pour passer deux générations, font que même le souvenir en a disparu. La vie facile liée à l’apparente abondance a fait disparaître pour une majorité des « citoyens » en Occident », et de plus en plus en Chine, le sens de la VERTU. D’où en Chine d’ailleurs la montée des systèmes de « crédit social », puisque ce peuple vit en dominance le sens collectif quand notre civilisation est devenue en dominante individualiste ; mais obéissance au conformisme n’est pas vertu.
Courtes vues, car tel n’est pas le contexte d’autres populations, en Afrique, en Indes, en Amérique du Sud … et aussi au cœur même des civilisations dites développées. Courte vue, faiblesse de l’esprit critique, réduction et manipulations des informations de masse diffusées …
Ces puissances, ces pouvoirs, liés au pétrole, continuent en fait de générer en permanence des guerres, des assassinats, et des pratiques d’hypocrisie institutionnelle … à un point que seuls les « initiés », celles et ceux « qui en sont », peuvent imaginer. Par exemple (mais il en est d’autres), l’un des documentaires met en évidence qu’au plus fort des conflits entre Israël et Pays arabes, Israël a été en permanence alimentée en pétrole venant d’Iran et d’Irak, par intermédiaires masqués (l’homme « aux manettes » vivant comme un chef d’État). L’autonomie énergétique et la richesse liée des vrais décideurs, … d’abord. Les valeurs et idéologies, … de l’habillage.
Quand même, engagés dans l’actuelle phase de mutation de civilisation, « les lignes bougent ».
Il est en effet de plus en plus difficile et couteux d’extraire en profondeur surtout au large, et surtout dans des climats difficiles.Ces travaux en profondeur dans la croûte de notre planète comportent des risques ; souvent les pratiques de l’ingénierie climatiques et prospective (et de l’espace) ont le visage de l’apprenti sorcier.
La prise de conscience de l’état de nos écosystèmes et du climatique, leurs accélérations et urgences, arrivent à toucher « les masses », et la pratique quasi généralisée du net réduisent (à la marge certes) la possibilité de faire n’importe quoi. Quoique, avec le temps des politiques « décomplexés » ?
Un État, autonome dans ses capacités potentielles de ressources, la Russie, fait preuve d’une grande prudence, n’est jamais entré dans l’OPEP, observe, régule, et contrôle toute opposition animée et financée « de l’extérieur » sur son territoire.
Autre exemple de sagesse avec la Norvège, qui se trouve satisfaite de son niveau de développement, et gèle l’exploitation de ses ressources pétrolières. Il est vrai que le niveau d’éducation moyen de sa population est élevé (facteur premier).
Le cas de la France est particulier, puisque la poursuite de la politique gaulliste en matière d’énergie a menée ce Pays à disposer du taux de fourniture en énergie par le nucléaire le plus élevé. Mais c’est reculer pour mieux sauter, puisque les « sachants » ne savent toujours pas comment traiter les déchets qui demeurent hautement polluants et dangereux pour le vivant à long terme, … et que (comme les experts indépendants tels ceux du CRIIRAD le démontrent) « on » ne sait toujours pas démonter les centrales hors d’âge !
Plusieurs facteurs lourds vont changer la donne :
> le refus de plus en plus d’États « pauvres » à servir de dépotoirs à déchets, dont une vaste part résultent du pétrole. Plus le refus de nouveaux « continents » de déchets principalement plastiques tel celui au milieu du Pacifique.
> les pandémies en court et à venir, qui vont contribuer à réduire les populations, soit directement soit indirectement par les effets des politiques de santé, résolvant ainsi le premier problème de l’ONU (donc de l’OMS), d’où baisse des « besoins » en pétrole.
> comme évoqué plus haut, la tendance à la baisse du retour d’investissement du fait des surcoûts d’exploitation (plusieurs causes conjuguées).
> le passage à l’état adulte d’une jeunesse qui, avec des variantes selon les cultures, semble porter des paradigmes de projets de civilisation fortement décalés de ceux des générations actuellement aux manettes. Rien à voir avec ce que nous avons rêvés ou rejetés (deux faces de la même pièce) en 1968 !
Par principe de réalité, le changement radical de nos contextes d’environnement de vie est tel que nous allons de nouveau devoir toutes et tous nous confronter à la matière (la Nature), … qui résiste. Réalité portant de nouveau l’obligation de l’effort (que de nombreuses autres populations n’ont jamais perdues), partant de nouvelles formes de VERTUS.
Sans tant de pétrole et sa financiarisation …, d’où de nouvelles donnes géopolitiques.
Michel André Vallée 23 septembre 2021